Protection d'une œuvre artistique par un notaire

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Un homme et une femme regardent une oeuvre

Les œuvres d'art (œuvre littéraire, création musicale, peinture, sculpture, créations de mode, logiciels, etc.) sont protégées par le droit d'auteur dès leur création, sans aucune formalité à accomplir.

Ce droit d'auteur permet à l'auteur de l’œuvre de bénéficier des prérogatives attachées à sa qualité de « propriétaire » de l’œuvre. Néanmoins, il peut être judicieux de constituer – au terme de la création de l’œuvre – une preuve faisant foi de la date et de l'auteur de l’œuvre.

Protection du droit d'auteur

Le droit d'auteur est constitué de l'ensemble des prérogatives dont jouissent les créateurs sur leurs œuvres littéraires ou artistiques.

Pour qu'une œuvre soit protégée, elle doit être « originale », c'est-à-dire apporter en elle-même la preuve qu'elle émane bien de son auteur et qu'elle caractérise sa personnalité. En cas de contentieux sur l'originalité d'une œuvre, le juge doit trancher, par appréciation souveraine, L'auteur dispose sur son œuvre de droits moraux et de droits patrimoniaux.

À retenir : toute atteinte aux droits de l'auteur constitue une contrefaçon. Selon la loi, constitue un délit de contrefaçon la reproduction, la divulgation ou la diffusion d'une œuvre sans l'autorisation de son auteur ou de ses héritiers.

Droits moraux

Ils protègent la personne même de l'auteur de l'œuvre. Cela signifie qu'il doit donner son consentement, ou qu'il peut s'opposer à ce que son œuvre soit divulguée ou utilisée. Il a le droit également d'imposer que son identité soit mentionnée sur l'œuvre.

Ces droits moraux appartiennent à l'auteur, puis à ses héritiers : ils sont attachés à la personne du créateur, à perpétuité.

Droit patrimoniaux

Ils permettent à l'auteur, puis à ses héritiers, d'autoriser ou de s'opposer à l'utilisation de l'œuvre. Au titre de ces droits, ils peuvent percevoir une rémunération.

Ces droits existent toute la vie de l'auteur ; à son décès, ils sont transmis à ses héritiers pour une durée limitée en France à 70 ans à compter du décès. À l'expiration de ce délai, l'œuvre tombe dans le domaine public.

Constituer la preuve de création d’une œuvre

En cas de contentieux, l'auteur de l'œuvre qui réclame la protection de celle-ci doit apporter la preuve de sa création, et de la date de celle-ci. Il est donc essentiel de se pré-constituer une preuve, afin de prévenir tout conflit.

La preuve peut être constituée auprès de l'INPI, au moyen de l'enveloppe SOLEAU :

  • cette enveloppe doit contenir une description ou une reproduction de votre œuvre en 2 exemplaires (un pour vous et un pour l’INPI) ;
  • vous pouvez retirer cette enveloppe pour 15 € à l’agence comptable de l’INPI ou directement à l’INPI.

Vous pouvez également faire appel à des sociétés d'auteurs comme :

  • la SACD : société des auteurs et compositeurs dramatiques ;
  • la SCAM : société civile des auteurs multimédia ;
  • la SACEM : société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, etc.

Votre recours peut aussi se faire auprès d'un huissier ou d'un notaire : le notaire reçoit l’œuvre et enregistre le dépôt sous forme d'un acte authentique.

La Chambre des huissiers de justice de Paris (CHDJP) propose un service en ligne de protection des créations soumises au droit d’auteur : Legide. Cette plateforme permet de délivrer et de stocker des preuves d’intégrité et d’antériorité d’une œuvre ou d’une innovation pour se prémunir contre les risques de contrefaçon et bénéficier des droits qui résultent du travail des créateurs. La protection est valide en France et dans les 178 autres pays signataires de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. Legide est ouvert à tous les créateurs (indépendants, entreprises, sociétés de gestion de droits d’auteur, etc.) et tous types de supports et œuvres (scripts, plans, croquis, collections, photographies, codes informatiques, designs, partitions de musique, etc.).

Avantages et inconvénients du notaire pour protéger son œuvre

Avoir recours à un notaire pour protéger son œuvre est le moyen le plus fiable. Juridiquement, il s’agit de la seule preuve irréfutable : cet acte authentique est revêtu du sceau de l'État en vertu duquel la signature de l'acte par le notaire fait foi de son contenu et de sa date et pourra, en cas de litiges, certifier d'une date de création. L’avantage indéniable est la durée de protection de l’œuvre en faisant appel à un notaire : elle est illimitée.

Recourir à un notaire compétent permet d'anticiper la succession de l'artiste, et d'évoquer les conséquences de certains actes très importants comme le contrat de mariage, la donation, et le testament. Anticiper permet d'éviter bien des litiges. Par ailleurs, dans ce type de dossier, il est important que le notaire ait des compétences en propriété intellectuelle, afin d'expertiser au mieux les œuvres.

Sollicité après le décès de l'artiste, le notaire intervient alors pour procéder à l'inventaire des œuvres, ce qui implique de les faire expertiser. L'officier public organise après ce premier acte la répartition, et gère les droits entre les héritiers. Il peut être amené à gérer des conflits, et notamment faire respecter l'exploitation et la divulgation de l'œuvre artistique dans le cas où un légataire estime que la démarche est contraire aux volontés du défunt.

Toutefois, c’est une protection plus coûteuse, les frais d’enregistrement s’élèvent à environ 150 €. Renseignez-vous, ce prix n’étant pas fixe à tous les notaires.

Payer des droits de succession avec des œuvres d'art

Créée en 1969 par André Malraux, la dation en paiement permet de s'acquitter des droits de succession. Ainsi, les héritiers peuvent s'acquitter du paiement de leurs droits de succession, souvent très élevés, en transmettant une ou des œuvres à l'État.

À noter : il est bien sûr évident que ces œuvres doivent avoir une grande valeur, car elles sont destinées à rejoindre les collections publiques de l'État.

Concrètement, au moment de la succession, la Direction générale des finances publiques instruit le dossier avec le notaire en charge du dossier. La Commission interministérielle d'agrément pour la conservation du patrimoine artistique national émet un avis pour un agrément. L'agrément est accordé ou non par le ministre du Budget.

Les héritiers ont quand même le choix d'accepter ou non de donner des œuvres à l'État, et ils ont aussi la possibilité de se rétracter.

Bon à savoir : la dation en paiement peut également être utilisée pour le règlement de l'impôt sur la fortune immobilière (décret n° 2018-680 du 30 juillet 2018).

Ces pros peuvent vous aider